La ménopause et le bien-être émotionnel : une période de profonde transition

En tant que psychologue traversant actuellement la périménopause, j’ai voulu examiner de plus près le lien entre cette étape de vie et le bien-être psychologique. La recherche confirme ce que beaucoup de femmes savent déjà : durant la périménopause et la ménopause, les symptômes de dépression et d’anxiété sont fréquents. Mais les hormones sont-elles la seule explication ? Pas tout à fait.

Les changements hormonaux jouent bien sûr un rôle. Ils influencent l’humeur, nous rendant plus irritables, impatientes ou émotionnellement réactives. Les symptômes physiques — comme les bouffées de chaleur, l’insomnie ou les douleurs corporelles — pèsent également lourdement sur notre équilibre psychologique. Pourtant, les chercheurs mettent en avant une relation bidirectionnelle : notre état émotionnel peut intensifier les symptômes physiques, tandis que l’inconfort physique persistant fragilise notre santé mentale.

Une transition qui dépasse la biologie

Au delà de l'aspect biologique, la ménopause doit être considérée comme une transition de vie majeure, demandant de multiples ajustements.

Transformations du corps et image de soi : il s’agit de s’adapter à un corps qui ne reflète plus l’image que nous avons de nous-mêmes ou que nous souhaitons projeter socialement. Cela peut limiter notre façon de vivre le quotidien, de nous relier aux autres ou de nous exprimer. Dans une société qui valorise la jeunesse et la vitalité, cela peut aussi ébranler l’estime de soi. La perte du sentiment d’attractivité ou de désirabilité peut mener à l’isolement ou à la solitude, et une baisse de l’intimité sexuelle peut encore accentuer l’impact sur l’image de soi et le bien-être psychologique.

Habitudes de vie et choix : il peut être nécessaire de modifier certains comportements ou d’en adopter de nouveaux. Cela peut sembler intense ou confus face à la multitude de conseils de santé, parfois contradictoires. S’ajoutent à cela les comparaisons avec des femmes qui paraissent traverser cette étape « sans effort », ce qui peut alimenter des

sentiments de honte ou d’inadéquation.

Identité professionnelle : les nombreux changements physiques — bouffées de chaleur, fatigue, brouillard cognitif, pour n’en citer que quelques-uns — influencent profondément la manière dont les femmes se perçoivent au travail. Ces perturbations, menant parfois à des arrêts de travail, entament la confiance et l’aspect de l’image de soi lié à la compétence professionnelle. Comme la ménopause est rarement reconnue ou soutenue dans le milieu professionnel, un stigmate persiste. Les femmes concernées se sentent peu vues ou accompagnées lorsqu’aucun aménagement n’est proposé pour les aider à traverser cette transition.

Vie familiale et relations : la ménopause coïncide aussi avec d’autres changements profonds. Les enfants peuvent quitter la maison, ce qui engendre un sentiment de vide ou de perte de sens. Dans d’autres familles, ce sont les adolescents qui traversent leurs propres turbulences, générant conflits et incompréhensions. Les couples doivent souvent redéfinir leur relation, trouver de nouvelles façons d’être ensemble sans l’axe parental commun. Parfois, cela révèle que la relation est insatisfaisante et que les enfants en constituaient le principal ciment.

Prendre soin de ses parents âgés : en parallèle, nous pouvons être amenées à assumer un rôle de proche aidante ou à traverser le deuil de leur disparition. Ces expériences apportent non seulement responsabilités et pertes, mais elles nous obligent aussi à réfléchir à notre propre avenir : Comment vais-je affronter la maladie ou la dépendance ? Serai-je un fardeau pour mes enfants ou pourrai-je entrer dans cette nouvelle étape avec sérénité et dignité ?

Comment mieux traverser cette étape ?

On le voit, il y a beaucoup à gérer. Tous ces changements peuvent agir comme des stresseurs car ils bousculent notre identité, nos rôles et nos systèmes de soutien.

Et pourtant, la recherche montre que la résilience psychologique pendant la ménopause est plus forte lorsque nous nous adaptons plutôt que de résister. Développer une estime de soi solide, retrouver un sentiment de maîtrise et nourrir un but dans la vie sont des facteurs protecteurs puissants.

Ainsi, la ménopause peut être repensée non comme une fin, mais comme une opportunité : prendre soin de soi physiquement et émotionnellement, redéfinir son identité et ses priorités, faire la paix avec des blessures passées, et créer des cercles de soutien où partager librement nos expériences. C’est aussi un temps de réflexion : reconnaître des rêves non réalisés ou des chemins non empruntés, et en tracer de nouveaux. Le soutien du partenaire joue également un rôle important : sa compréhension — ou son absence — peut profondément influencer la manière dont nous vivons cette étape.

Le bien-être émotionnel à la ménopause exige une approche holistique — qui englobe émotions, pensées, sensations corporelles, relations et environnement. Avec ouverture et soutien, cette transition peut devenir non seulement quelque chose à traverser, mais une chance de grandir et de s’épanouir dans une version plus pleine et authentique de nous-mêmes

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